Canaries - île de La Palma

Publié le par Une île deux portraits

Balades sur La Palma, Canaries 

                                                                      

En arrivant à La Palma nous n’avions pratiquement aucune idée préconçue des paysages que nous allions y rencontrer. Tout au plus, des canaries nous pouvions avoir l’esprit une vague image de plage avec des hôtels en barre qui vous cachent le paysage, des plantations de palmiers sur le front de mer et quelques senteurs de frites et de crème solaire. Mais pas du tout ! La réalité est tout autre au moins à La Palma et nous avons bien fait d’y faire escale. Les gens rencontrés par ici, pour l’essentiel des personnes en bateau comme nous, sont unanimes pour dire que cette île est un petit bijoux, très peu visité, peu habité et vraiment magnifique.

 

Nous avons commencé notre visite en nous programmant une petite randonnée vers le nord, ou paraît-il était préservée une forêt primitive subtropicale de lauriers. Pour choisir le bus devant nous déposer, rien de plus facile, seules deux routes quittent Santa cruz, l’une vers le nord, l’autre vers le sud, il suffit donc de bien choisir son trottoir direction la forêt enchantée, là s’arrêtent les démarches d’orientation.

A l’office du tourisme, une dame nous expliqua que pour se rendre au début du chemin, à la casa del monte, il nous fallait prendre un taxi qui moyennant pas mal d’euros, vous évitait une marche fatigante et quelques litres de sueur. Sur la carte, cette « marche d’approche » faisait tout au plus 8 km à vol d’oiseau, alors nous nous sommes lancés en commençant par une petite ruelle en béton bordée de quelques maisons modestes très colorées et très petites, pleines de fleurs, d’oranges et de bananes, une ruelle montant droit vers le sommet, une ruelle en pente, une ruelle qui vous casse les jambes… jamais vu ça, on se serrait cru en haute montagne à faire les chèvres sur les Drus ; je me demande bien comment les gens d’ici se garent et font leur marches arrière… les rois du démarrage en côte j’imagine ! Nous avons vaguement tendu le pouce lorsqu’un vieux pick-up tout pourri monta mollement cette colline dans un gros nuage de fumée noire, mais bon, nous n’avions pas vraiment envie de mettre se vieil homme dans le pétrin vu que son tas de ferraille ne semblait pas pouvoir supporter de gravir cette montagne sans élans. En contrebas, les bananeraies en terrasse se faisaient de plus en plus petites et la brume du matin se dégageait pour nous laisser un bel aperçu sur le bleu de la mer.

Rapidement, la route fit place à un chemin de terre raviné mais montant toujours aussi raide dans un paysage de maquis à la terre un peu rouge. Le décor changeait à mesure de notre progression dans un sentier creux, en une forêt assez dense mais sèche de lauriers, puis en un étage de pins de petite taille mais offrant une ombre bienfaitrice. De la casa del monte, toujours aucun signe, et pour cause, celle-ci se trouvait à 1400 mètres… vous parlez d’une marche d’approche, nous sommes arrivés là haut aussi trempés qu’à la sortie d’une bataille d’eau (surtout Stan), avec de la crème solaire qui vous coule dans les yeux (surtout moi) et des jambes flageolantes. Mais le repas pris au dessus des nuages nous fit l’effet d’un festin pantagruélique et l’eau de source fraîche puisée dans un petit ruisseau canalisé était comme de l’eau de jouvence, avec un goût d’humus en plus.

La suite de la randonnée se fit dans un paysage pas croyable dure à décrire : disons que le chemin vertigineux longeait à mi hauteur, deux espèces de canyons abruptes et profonds, dont les flancs, les sommets, les parois, les bords, les fonds et la moindre aspérité étaient recouverts d’une végétation d’une incroyable diversité.
Cette luxuriance parfois sèche, parfois très humides, prenait toutes les teintes du jaune au vert selon son exposition au soleil. Nous suivions dans ce décor le même ruisseau canalisé de pierre qui nous désaltérait à midi.

Parfois (treize fois) le chemin devenait tunnel, pour quelques mètres ou quelques dizaines de mètre ; l’obscurité devenait alors totale mais nous avions pris soin d’apporter des lampes torche, ou plus exactement une lampe torche et une lampe frontale mourante qui m’indiquait juste quand me baisser. Parfois un trou de la taille d’un homme comme une fenêtre sur l’à-pic offrait un peu de lumière, et en se penchant nous avions comme des fourmis dans les pieds !

ouverture sur un tunnel

Grosses les fougères!

Pour le dernier tunnel, deux sacs plastiques élégamment taillés en ponchos nous attendaient à l’entrée. Leur fonction était de nous abriter de l’eau qui tombait averse dans le boyau, car celui-ci passait sous une cascade qui suintait abondamment à travers la roche poreuse et volcanique. On se serait cru dans Indiana Johns !

 La journée avançait, il nous fallait redescendre avant la nuit, en empruntant le lit d’un ancien torrent entre deux parois très encaissées, univers minéral, de fougères, de lichens et de mousses.

déambulation dans un lit de rivière

A mi chemin nous avons croisés trois sympathiques allemands aux regards passablement préoccupés voir franchement inquiets. Ils rebroussaient chemin parce qu’ils commençaient à douter de la bonne direction… ce qui devait se traduire par une randonnée de retour à la nuit tombée, au bord de précipices… malin comme décision !

Ils nous ont demandé : « c’est où, c’est où le chemin ! »,

Et nous on ne pouvait que leur répondre, « ben, a priori je crois que c’est là ! »

« Oui mais vous êtes certains »

« Ben non, on imagine c’est tout », réponse qui ne semblait pas les rassurer puisqu’ils gardaient leurs yeux suppliants ; du coup prenant un ton des plus assertifs, le regard confiant et paternaliste, nous avons fini par leur assurer qu’il n’y avait absolument aucun doute possible, que ce chemin était le chemin de la civilisation, le chemin de la liberté… ce qui eu pour effet de métamorphoser (après de profonds soupirs de soulagement coordonnés) leurs visages soucieux en mines guillerettes ! Je vous le dis, nous sommes des héros !

La randonnée se termina entre chien et loup, dans le deuxième canyon ou la canopée plus dense encore donnait l’impression que la nuit était déjà tombée. Fourbus, nous avons terminé en stop (moins de 5 secondes d’attente) et avons engloutis deux immenses hamburgers arrivés à Santa Cruz.

 

Le lendemain nous avons loué une voiture pour changer du stop et pour voir plus de paysage avec moins d’efforts, un meilleur rapport calories/lieux visités si vous voulez, l’immersion végétale en moins. Je dis voiture mais autant parler de bolide : la fiat Panda, gris métallisée, en forme de yahourt ! Comme nous avions déjà emprunté l’unique route du nord, nous avons choisi de tracer vers la seule route du sud. A moins de trente kilomètres de la rando de la veille, nous voilà plongés dans un paysage lunaire ou le caillou est roi. Il faut savoir que La Palma comme le reste des Canaries d’ailleurs trouve son origine dans un bouillonnement volcanique, dont la dernière expression est une éruption datée de 1971. La flore n’a pas eu le temps de repousser sur les flancs des volcans du sud, si ce n’est quelques espèces de plantes de petite taille aux formes variées. Mais globalement il n’y a que de gros blocks de lave noire, des graviers tarabiscotés légers comme une plume mais tranchant dans les chaussures, et toutes les tailles et formes intermédiaires de roches, toujours noires.

sur le flanc d'un volcan

Pareil...

Au pied de ces volcans, coincés par la mer, les canariens ont développé une intense culture de la banane (85% des exportations), en serre ou en plein air, sur de vastes terrasses dont les fondations sont constituées par de gros blocks de laves poreuses à peine dégrossis. L’addition « bleu de la mer », « noire des montagnes » et « vert des bananeraies » est du plus bel effet ! Pareil pour le contraste entre la mangue orange du midi dégustée sur le sable basaltique d’une plage.

Culture de la banane

Vol
can et mangue

La Palma n’est que falaises et montagnes et de fait il n’y a pratiquement pas de plage, mais la playa de Zamora plantée au milieu de ce no mans land est magique et brute de décoffrage : le sable est comme du caviar, les falaises comme des personnages en bas reliefs, la mer comme agitée et nos doigts de pieds comme des éventails !


Plage de Zamora

Le moteur de notre formule Panda nous emmena ensuite en haut du volcan de San Antonio, un cratère énorme qui abrite en son sein quelques pins des canaries accrochés dans la caillasse et d’un vert de jeune pousse. Je ne sais pas trop à quoi doit ressembler une éruption explosive, mais après une journée pareil, on ne peut que trembler comme la terre…

Volcan de San Antonio

Vignes sur le flanc de San Antonio

Une austérité de moine!

Le soir nous avons encore soupé de hamburgers, allez deux fois n’est pas coutumes quant même !

 

Le lendemain virée en porche yahourt derechef, tour de l’île par la boucle nord, 100 km de virage à droite à gauche dans des paysages plus austères, ventés et merveilleux les uns que les autres.

Eglise dans un village perdu du nord de l'île

 Je passe les détails sauf pour parler de la plus grande caldera du monde qui s’avère d’après des études plus récentes ne pas être une caldera du tout, mais les explications glanées ne sont pas très claires. Sur un versant de l’hypothétique caldera, une vague de nuage descendait comme une couverture très clairement délimitée, alors que de l’autre versant le soleil perçait laissant découvrir un cirque boisé vert vif, des aiguilles verticales ou raisonnaient le cris de plusieurs rapaces nichant au sommet, et des arbres déracinés par les bourrasques. On voudrait planter la tente, faire un feu et manger de grosses côtes de bœuf dans un paysage pareil !


Vague de nuage...

Stan, la caldera et les pins (titre de western)

Pour le reste nous venons de passer les deux derniers jours à chercher une machine à coudre, à apprendre à s’en servir, et à recoudre la bande anti UV du génois en cassant une dizaine d’aiguille au passage, en faisant des pelotes de fil et en maugréant dans nos barbes voir en jurant comme des charretiers !

 

Après demain départ pour la Gomera, l’île fruitière de l’archipel… salade de fruit en perspectives !!!

 

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E
MAGNIFIQUEEE
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